Je viens d’Emmanuelle Bayamack-Tam
« L’un des grands avantages de la négligence parentale, c’est qu’elle habitue les enfants à se tenir pour négligeables. Une fois adultes, ils auront pris le pli et seront d’un commerce aisé, faciles à satisfaire, contents d’un rien. A l’ inverse, ceux qu’on aura élevés dans le sentiment trompeur qu’ils sont quelque chose multiplieront à l’infini les exigences affectives, s’offusqueront au moindre manquement et n’auront de cesse qu’ils ne vous pourrissent l’existence. Faites le test.
Je reconnais tout de suite un adulte dont l’enfance est passée inaperçue, la mienne ayant commencé par un abandon brutal… « Incipit.
Un roman à trois voix de femmes, une jeune fille, sa mère et sa grand-mère. « Je viens » n’a pas toujours été facile à appréhender tant il peut plonger dans une certaine mélancolie, un dégoût des autres et de soi. En tous cas, il ne laisse ni indifférent, ni optimiste.
Certains personnages ici sont racistes, négligents, méchants, morts dedans, hypocrites, dépressifs. L’écriture est précise, froide et musicale comme une boîte à musique perdue dans un mouroir. L’autrice dénoue les liens mortifères au sein d’une famille. Nous traversons tous des deuils successifs avant la vraie mort. Ils s’inscrivent dans nos vies depuis la naissance. En avons-nous conscience ? Trois introspections non édulcorées des vies de Charonne, Nelly, Gladys. Pas d’indulgence, pas de langue de bois non plus, soyons lucide.
Une plume serrée, poétique, qui ne m’a pas lâchée.
L’incipit s’ouvre sur un constat saisissant et direct pour une compréhension très claire : Charonne, jeune enfant, est en danger car en manque de protection et d’affection.
Vous oublierez un instant le bonheur ou la naïveté, vous interrogerez : Ai-je seulement vécu heureux un seul jour de ma vie ? Suis-je aimé et comment ?
Vous vous rappellerez que la confiance se mérite, que la vieillesse et la maladie guettent, et n’oublierez pas que la différence peut révéler le pire chez les autres. Pour tous ceux qui un jour se sont sentis détruits, humiliés, blessés. 💔
Ce qu’on devient, mon Dieu, ce qu’on devient et personne pour nous prévenir.
crayon de couleuvre
Bienvenue sur mon site. Mes lectures: Emprûnts de bibliothèque, achats en librairies indépendantes, brocantes... Partages hebdomadaires Retrouvez-moi aussi sur instagram crayondecouleuvre@gmail.com