Les oscillants de Claudio Morandini
« Depuis la plaine, la route se dirige tout droit vers l’horizon, en direction de la chaîne de montagnes d’un gris uniforme. À mesure qu’on approche, on distingue des différences de tons dans ce profil lointain, des échancrures, des dépressions. » #incipit inquiétant.
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Traduit de l’italien par Laura Brignon.
« Tout dans ces villages, parle une langue que plus personne ne connaît. »
Une très bonne lecture oscillant entre réalisme et fantastique, en montagne, à Crottarda, « village de l’ombre » car sans soleil durant six mois de l’année. En face, sur le versant ensoleillé, les ennemis d’Autelor.
Une jeune ethnomusicologue enquête sur des chants de bergers dans cette région hostile, humide, froide, angoissante. Des cris, des chants étranges entendus déjà dans l’enfance. Pourtant, ses parents ne la croyaient pas…
« Car c’était en pleine nuit, aux heures qui précédent l’aube, que je vivais les aventures les plus singulières. »
Un roman laissant libre cours à la création des possibles, aux réalités inconnues tenues secrètes, monstrueuses peut-être car nées de nos peurs les plus profondes. Crottarda cauchemardesque et inspirante. Le réalisme nous laisse sans cesse dans le doute, l’inachevé, comme si nous sortions simplement d’un mauvais rêve, d’un délire, d’une forte fièvre née de la solitude, d’une trop forte sensibilité. A cela s’ajoutent les légendes alpines, les rancœurs ancestrales, les forces telluriques.
« On entend les cris d’ici ! Et ils sont si pleins de peur et de douleur que nos bêtes se mettent à crier elles aussi, et puis nous aussi, et en fin de compte on crie tous, eux, nous, les daines qui sont restées seules dans la forêt, les daims plus jeunes qui comprennent ce qui leur arrivera dans quelques années… «
Et s’il existait des êtres capables de s’immiscer dans notre lit la nuit, des femmes capables d’avoir des visions. Le personnage de Bernadetta est très étrange.
« Elle est prise d’un désir de s’élancer au-dehors, de s’enfuir dans la nuit, que seul le froid glacial et son indolence l’empêchent d’assouvir. »
Certains habitants nous effraient avec leurs règles, leurs manières, leurs haine envers « Ceux-là », habitants d’Autelor, sur le versant ensoleillé d’en face. Un seul désir, fuir la réalité !
L’auteur prend le temps d’installer son histoire. Immersive, elle nous rappelle que nous sommes tous des oscillants à notre manière et avec plus ou moins de folie.
Sauvage, obsédant, bravo à Claudio Morandini dont je lirai d’autres romans avec plaisir.
En librairie depuis le 19 Août 2021.
Merci beaucoup aux Éditions Anacharsis pour l’envoi de ce roman.
crayon de couleuvre
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