Une matinée d’amour pur de Yukio Mishima

Une matinée d’amour pur de Yukio Mishima. Nouvelles traduites du japonais par Ryôji Nakamura et René de Ceccatty. Deux-cent-quatre-vingt-quinze pages.

Dès la première nouvelle intitulée « Une histoire sur un promontoire », j’ai été touchée de plein fouet par la plume superbe de Yukio Mishima. Dans cette dernière, Akichan, un jeune garçon âgé de onze ans, s’abandonne à la rêverie dans les paysages superbes d’un port de pêche. Il est un narrateur ivre de beauté et soumis à des sentiments intenses. D’entrée il s’interroge sur les critères de normalité et de santé imposés par les adultes. Il s’évade dans ses pensées superbes.
Chaque nouvelle souligne notre rapport à la beauté, au désir, au sentiment amoureux, au plaisir. Les états d’âme sont gouffre, appel du vide,  effervescence, submersion, étrangeté, perversion, cruauté, mélancolie, paysages. Une richesse d’émotions.
La guerre n’est-elle pas la pire de toutes les perversions ? Les mots sont puissants pour appuyer le ressenti douloureux et ambivalent des protagonistes.
« Du reste, ce nom avait tendance à s’attacher à tous mes souvenirs de honte. Aussi bien à une curiosité folle qu’à une vénération absurde du désir charnel. Et ce nom finit par incarner pour moi un tabou ou une formule magique. »
Chaque nouvelle défie, transgresse, révèle les forces pulsionnelles de vie et de mort qui s’emparent d’un individu. Le style de l’auteur nippon est d’une élégance remarquable. L’âme aspire à la paix, à vibrer à la fréquence la plus haute éternellement, à retrouver son premier éclat, sa pureté, à transcender les traumatismes liés à la guerre sino-japonaise. Elle est amoureuse éternelle à la recherche du bonheur perdu, ce qui rend le récit encore plus beau et douloureux. Elle éprouve le désir fou de suspendre le temps dans un silence étourdissant et sensuel. Nette préférence pour deux nouvelles : « Une histoire sur un promontoire » et « Une matinée d’amour pur. »
Magnifique.❤️ Coup de cœur pour cette plume époustouflante qui a fendu ma carapace. Un maître devant lequel on s’incline.
De La Librairie Le Phénix.