Peupler la colline de Cécilia Castelli
« Croire au vertige. À l’obsession. S’enivrer des parfums anciens. Des quelques rires qui subsistent. Rien que des éclats qui bourdonnent dans ses oreilles. De simples vestiges. La mémoire éclatée. La peau oubliée. L’homme regarde la photo qu’il vient de sortir de sa poche. C’est le portrait d’un enfant. Est-ce vraiment lui qu’il cherche ? Il ne sait plus… » Incipit.
J’avais beaucoup aimé le premier roman de Cécilia Castelli intitulé « Mollusque », aux Éditions Le Serpent à plumes. Puis j’avais lu « Frères Soleil » aux Éditions Le Passage : Un coup de coeur. Merci beaucoup Cécilia pour ce beau cadeau. Ton troisième roman est une merveille.
« Romain était tel un petit poisson qui nageait à contre-courant du monde. »
__Une lecture atypique puisque le réalisme magique domine ici afin de préserver les personnages d’une réalité douloureuse trop pénétrante, distance extraordinaire et nécessaire jusqu’à la fin bouleversante.
Le soleil ne brille plus depuis longtemps au cœur de la famille Poittevin. Romain, le cadet âgé de neuf ans, a disparu. Ce sont le vide et l’absence. Le roman s’ouvre trois ans plus tard lorsque Thibault, son grand frère, part sur ses traces. « Son rire… Puis le silence. » Avant l’effroyable vision ne laissant pas de doute. Le choc. Retour quatre ans plus tôt. Romain a huit ans. Enfant pas comme les autres, il avait besoin d’être protégé. Au bord de cet abîme qu’est le monde trop petit et mortifère des adultes, « Peupler les collines » abrite un réalisme magique déstabilisant, défiant la norme, les certitudes, se jouant de nos culpabilités, tordant le cou à nos souffrances, en famille, en vacances, à l’école, dans une maison de retraite, avant et après la disparition. Une certaine normalité bien huilée en apparence. Pour réfléchir à la place de l’enfant qui ne rentre pas dans les cases, bouscule, gêne, à notre fragilité et à notre impuissance par opposition à la puissance de la nature finalement bien plus protectrice et libre. Croire au vertige ? Cette phrase m’a obsédée pendant toute la lecture. La fin est bouleversante de poésie, de douleur et de beauté.
J’ai pris plaisir à retrouver la plume de Cécilia. D’une belle humanité, avec ce naturel bienveillant qui la caractérise, elle peuple nos collines malades d’un autre langage, celui de la nature sauvage, un langage intuitif, vivant, celui du cœur, plus léger, avec un animal, une personne âgée, un arbre, plus sincère, essentiel pour aider un enfant à grandir et s’enraciner dans le monde. Elle met en garde contre les miroirs aux alouettes, comment un paradis devient un enfer. Une très belle surprise, je vous encourage vivement à découvrir cette auteure. En librairie le 18 Août.
« Il percevait le monde d’une autre façon, presque magique. »
crayon de couleuvre
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